
Optimiser la santé des femmes par l’activité physique : contexte, enjeux et bénéfices
Martine Duclos, médecin du sport, endocrinologue, diabétologue, physiologiste et présidente du comité scientifique de l’Observatoire national de l’activité physique et de la sédentarité, rappelle que l’activité physique a des effets majeurs sur la santé : elle diminue la mortalité et prévient les maladies cardiovasculaires, certains cancers, l’ostéoporose et présente des bénéfices spécifiques pendant la grossesse.
Pourtant, les femmes restent moins actives que les hommes, dès l’enfance et tout au long de la vie : seulement 45,5 % des femmes Françaises adultes déclarent pratiquer une activité physique régulière, contre 55,8 % des hommes.
La recherche scientifique, encore très centrée sur les hommes, peine à intégrer les spécificités féminines. Seules 20 % des publications sont consacrées aux femmes. Étudier les femmes implique de prendre en compte les différentes phases du cycle ovarien pour les femmes en âge de procréation, la contraception et son type, la grossesse ou encore la ménopause.
Les différences physiologiques entre les sexes sont bien établies : les hommes ont généralement de meilleures performances physiques (plus de masse musculaire, meilleure capacité cardio-respiratoire), tandis que les femmes présentent des atouts en endurance, en efficacité métabolique en cas de faible disponibilité énergétique, et en adaptation au stress — des qualités reconnues, notamment, dans les contextes militaires.
Adapter la recherche et les recommandations à ces spécificités est essentiel pour une approche plus juste et efficace de la santé et du sport au féminin.
Utilisation des outils digitaux pour suivre la pratique d’activité physique des patientes atteintes de cancer du sein
Lidia Delrieu, chercheuse à l’IRMES au sein de l’INSEP spécialisée dans les liens entre activité physique et santé, s’intéresse à l’apport des outils digitaux pour mieux suivre l’activité physique des femmes, notamment celles atteintes d’un cancer du sein, et optimiser leur prise en charge.
Elle rappelle l’importance de l’activité physique comme levier de prévention face à la hausse des maladies chroniques (cancers, maladies cardiovasculaires, diabète…).
Lidia Delrieu présente sur quatre études clés :
- COVIFIT (2019–2022) : la crise du COVID-19 a provoqué une baisse durable de l’activité physique dans la population générale. En 2022, les niveaux restent inférieurs à ceux d’avant la pandémie, soulignant l’urgence de relancer la pratique.
- BEFORE : enquête menée auprès de 2 300 femmes pour comprendre comment mieux les inciter à bouger. Résultat : elles plébiscitent les séances en ligne encadrées par des professionnels. Le manque de motivation et la fatigue sont les freins principaux, et un discours centré sur la qualité de vie est plus mobilisateur que des termes médicaux techniques.
- DIGIFIT : deux cohortes de femmes atteintes d’un cancer du sein, suivies pendant un an avec des montres connectées, des questionnaires et des données cliniques.
- Neofit : 300 femmes de moins de 70 ans traitées par chimiothérapie puis chirurgie.
- Grannyfit : 200 femmes de plus de 70 ans recevant divers traitements. Objectif : mieux comprendre l’activité physique réelle et ses effets sur leur parcours de soins.
- ABLE02 : évalue, via des montres connectées, l’impact d’un programme de six mois d’activité physique sur la qualité de vie et la fatigue de femmes atteintes d’un cancer du sein métastatique.
- Groupe contrôle : recommandations générales.
- Groupe intervention : accompagnement personnalisé avec un professionnel. Cette étude vise à mesurer les bénéfices d’un suivi individualisé.
Ces travaux montrent l’importance de mieux adapter les dispositifs d’activité physique aux besoins, aux freins et aux réalités des femmes, en s’appuyant sur les outils numériques pour un accompagnement plus précis et personnalisé.
L’influence des fluctuations hormonales sur le bien-être et la performance des athlètes féminines
Juliana Antero, épidémiologiste à l’IRMES/INSEP, présente certains résultats du projet EMPOW’HER, mené auprès de plus de 130 athlètes olympiques. L’objectif : mieux comprendre l’impact du cycle menstruel et de la contraception sur la santé, le bien-être et la performance des femmes, et élargir ces données à la population générale.
Les données sont recueillies quotidiennement via une application mobile et des capteurs (GPS, cardio…), complétés par des prélèvements salivaires mesurant œstrogènes, progestérone et testostérone.
Deux profils de sportives ont été comparés :
- Celles ayant un cycle naturel : leur bien-être varie selon le cycle, avec un pic positif autour de l’ovulation, et une baisse pendant les règles et la phase prémenstruelle, liée aux symptômes menstruels (douleurs, fatigue, maux de tête).
- Celles sous pilule monophasique : présentent moins de variations dans l’évaluation du bien-être, mais augmentation des symptômes durant les 7 jours d’arrêt de prise de pilule, impactant l’entraînement.
L’étude souligne aussi que la première moitié du cycle est plus favorable à l’adaptation à l’effort, tandis que la seconde, dominée par la progestérone, serait moins propice.
Enfin, les troubles menstruels, comme les cycles irréguliers ou absents, souvent une conséquence d’un déficit énergétique chronique, sont associés à une baisse des œstrogènes, augmentant le risque de fractures de fatigue.
Ces résultats renforcent la nécessité d’intégrer les spécificités physiologiques féminines dans la recherche et les pratiques sportives.
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